Titre : Rien ne s’oppose à la nuit
Auteure : Delphine de Vigan
Edition Le Livre de Poche, 2013 ( éditions JC Lattès, 2011 )
Prix des Lecteurs sélection 2013, Grand prix des lectrices de Elle 2012, prix Renaudot des lycéens 2011, Prix roman France Télévisions 2011
Genre : littérature contemporaine, biographie
» Elle était ce mélange étrange de timidité maladive et d’affirmation de soi. » ( p. 334 )
Résumé :
» La douleur de Lucile, ma mère, a fait partie de notre enfance et plus tard de notre vie d’adulte, la douleur de Lucile sans doute nous constitue, ma sœur et moi, mais toute tentative d’explication est vouée à l’échec. L’écriture n’y peut rien, tout au plus me permet-elle de poser les questions et d’interroger la mémoire. La famille de Lucile, la nôtre par conséquent, a suscité tout au long de son histoire de nombreux hypothèses et commentaires. Les gens que j’ai croisés au cours de mes recherches parlent de fascination ; je l’ai souvent entendu dire dans mon enfance. Ma famille incarne ce que la joie a de plus bruyant, de plus spectaculaire, l’écho inlassable des morts, et le retentissement du désastre. Aujourd’hui je sais aussi qu’elle illustre, comme tant d’autres familles, le pouvoir de destruction du Verbe, et celui du silence. Le livre, peut-être, ne serait rien d’autre que ça, le récit de cette quête, contiendrait en lui-même sa propre genèse, ses errances narratives, ses tentatives inachevées. Mais il serait cet élan, de moi vers elle, hésitant et inabouti. » Dans cette enquête éblouissante au cœur de la mémoire familiale, où les souvenirs les plus lumineux côtoient les secrets les plus enfouis, ce sont toutes nos vies, nos failles et nos propres blessures que Delphine de Vigan déroule avec force. »
Mon avis :
Delphine de Vigan raconte ici, la vie de sa mère, Lucile, pari risqué car les plus grands auteurs s’y sont essayés, mais c’était sans compter le talent et l’authenticité avec laquelle l’auteure se livre et livre sa mère et sa famille, en respectant le passé.
» Je ne sais plus quand est venue l’idée d’écrire sur ma mère, autour d’elle, ou à partir d’elle, je sais combien j’ai refusé cette idée, je l’ai tenue à distance, le plus longtemps possible, dressant la liste des innombrables auteurs qui avaient écrit sur la leur, des plus anciens aux plus récents, histoire de me prouver combien le terrain était miné et le sujet galvaudé […] » ( p. 16 )
L’auteure s’attarde tout d’abord à présenter la famille de sa mère, en reprenant l’enfance de Lucile, en questionnant ses oncles et tantes, qui ont été tour à tour enchantés par le projet et plus réticents. Une fois que nous connaissons la personne de Lucile, nous comprenons que pour l’entourage il fût difficile de revenir sur leur passé en sa compagnie. Et nous sommes forcés de nous poser la question nous même, si nous étions à leur places, comment réagirions nous si nous devions revivre des événements que nous serions tentés de reléguer au fond de notre mémoire.
C’est lorsque Delphine de Vigan en vient à parler de sa propre enfance avec sa mère, que le lecteur se pose la question du voyeurisme. En effet, nous nous attachons à cette mère en crise, et à ses enfants grandit avec des responsabilités trop grandes pour leur âges. L’auteure présente Lucile avec un regard adulte mêlée de ses souvenirs et de ses mots d’enfants, retrouvés dans ses journaux intimes. Une grande force se dégage alors de la narration, puisque nous comprenons que toute enfance détermine la personne que l’on sera plus tard.
Une ambiance de douceur mêlée aux fellures des personnages, parsèment le roman, et nous sentons une grande crainte de la part de l’auteure de ne pas réussir à retranscrire l’étendu de la personne de Lucile. Une retenue sans jugements des choix des uns et des autres, nous éclairent sur les personnalité de cette famille. Une famille avec ses secrets et ses révélations comme nous en connaissons tous.
Le style de l’auteure est très beau car à plusieurs reprises elle intervient dans son récit, elle explique avec justesse les difficultés, les égarements et les errances contre lesquelles elle à dût se confronter, afin de restituer au mieux, et le plus justement possible, la vie de Lucile et sa personnalité au fil de son existence.
» Incapable de m’affranchir tout à fait du réel, je produit une fiction involontaire, je cherche l’angle qui me permettra de m’approcher encore, plus près, toujours plus près, je cherche un espace qui ne serait ni la vérité ni la fable, mais les deux à la fois. » ( p. 139 )
C’est très intéressant de voir la conception du livre que nous avons dans les mains, de comprendre le travail d’écriture d’un auteur, et surtout la conception d’une biographie, qui touche quelqu’un de très proche de nous, tel qu’une mère. En effet, quelle part de vérité allons nous enlever avec notre subjectivité ? Une biographie sur notre mère, n’est pas le travail le moins objectif qui soit ? Delphine de Vigan exprime véritablement au lecteur ses peurs d’appréhender son travail, mais également son besoin de retranscrire cette femme.
» Je m’éloigne un peu plus de Lucile, en voulant l’approcher. » ( p. 140 )
En conclusion, une biographie très forte sur une mère en crise et des enfants grandis trop tôt. Une auteure qui parle avec ses mots d’enfant, et une douceur malgré des moments difficiles.
L’auteure :
Apparue discrètement sur la scène littéraire, Delphine de Vigan a su se faire une place de choix parmi les écrivains français. Directrice d’études dans un institut de sondages, la jeune femme écrit le soir, sans prétendre à la carrière de romancière qui sera la sienne, avant de pouvoir vivre de sa plume. Après la parution, en 2001, d’un premier récit d’inspiration autobiographique intitulé ‘Jours sans faim’, c’est avec le recueil de nouvelles ‘Les Jolis Garçons’ et le roman ‘Un soir de décembre’, deux ouvrages sur le thème de la désillusion amoureuse, que l’écrivain gagne le coeur d’un large public. Un bouche à oreille enthousiaste contribue au triomphe de ‘No et moi’, l’histoire d’une rencontre entre une adolescente surdouée et une jeune SDF qui vaut à son auteur d’être plébiscitée par les libraires (Prix des libraires 2009) et les lecteurs. Mêlant avec justesse les dimensions sociale et intime, l’écrivain poursuit dans ce registre avec le roman ‘Les Heures souterraines’, paru en 2009. En 2010 sort l’adaptation cinématographique de ‘No et moi’ par Zabou Breitman. Son roman ‘Rien ne s’oppose à la nuit’ est publié en août 2011 par les éditions JC Lattès. En 2013, elle réalise son premier film, une comédie romantique sur le sexe, À coup sûr.
Source : http://www.evene.fr
J’aimerais bien découvrir cette auteure, j’ai No et Moi dans ma wish-list 🙂
J’aime beaucoup Delphine de Vigan, son écriture me parle énormément ! Je n’ai pas lu No et moi, mais il parait qu’il est très touchant =)
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J’ai découvert cette auteure avec No et moi ^^ J’avais été impressionnée par son style d’écriture. Je retentrai bien l’expérience.. peut-être avec ce livre-là. Je trouve le thème intéressant 🙂
Ah oui son style est vraiment très bon et très beau. Celui-ci est vraiment très dur à lire car l’auteure se révèle vraiment, mais c’est une hommage magnifique !
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